Paris élude la nationalisation de Florange, Mittal investira

Un travailleur du site de Florange (Reuters Picture
Un travailleur du site de Florange
(Reuters Picture

PARIS (Reuters) – Le gouvernement français a annoncé vendredi soir un accord avec ArcelorMittal sur l’avenir de Florange, évitant ainsi d’avoir à exécuter sa menace de nationalisation du site sidérurgique mosellan.

Le Premier ministre a annoncé que le géant de l’acier acceptait d’investir 180 millions d’euros sur cinq ans dans la partie transformation de l’acier de Florange, mais les hauts-fourneaux du site ne seront pas rallumés.

“Il n’y aura pas de plan social à Florange”, a-t-il souligné, même si des réductions de postes seront mises en oeuvre à travers des départs anticipés à la retraite.

Jean-Marc Ayrault a expliqué que le gouvernement n’avait pas retenu l’hypothèse d’une “nationalisation transitoire” du site, “au vu des engagements qu’il a obtenus d’ArcelorMittal”.

Brandie initialement par le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, cette menace de nationalisation a été confirmée par la suite par le gouvernement.

Le Premier ministre a toutefois reconnu que cette solution n’était pas efficace “face à un problème de débouchés pour une entreprise ou face à un problème de compétitivité”, comme c’est le cas pour les hauts-fourneaux de Florange.

“PAS DE REPRENEUR CRÉDIBLE”

Surtout, une source à Matignon a indiqué que l’industriel prêt à investir 400 millions d’euros pour reprendre le site de Florange qu’avait évoqué Arnaud Montebourg mercredi devant l’Assemblée nationale n’était pas crédible.

“Il n’y avait pas de repreneur crédible et ferme”, a dit cette source proche des négociations, mettant directement en doute le sérieux de la menace de nationalisation temporaire d’Arnaud Montebourg.

L’Elysée a fait savoir que l’Etat resterait vigilant sur l’application de l’accord, conclu à l’issue d’un bras de fer de plusieurs jours avec le groupe dirigé par Lakshmi Mittal.

“Les moyens de pression ne disparaissent pas avec l’annonce d’aujourd’hui. S’il (Mittal) se comportait comme un homme qui ne respecte pas sa parole, il y a des moyens de pression”, a-t-on déclaré dans l’entourage du chef de l’Etat.

LE REVOLVER SUR LA TABLE

“On garde le revolver sur la table”, a résumé un conseiller.

En officialisant le 1er octobre l’arrêt des hauts-fourneaux de Florange, avec à la clé 639 suppressions d’emplois, ArcelorMittal, avait laissé deux mois au gouvernement pour trouver un investisseur pour la “phase à chaud” du site.

Faute de repreneur pour cette seule activité jugée non rentable dans le contexte actuel de forte baisse du marché de l’acier, le gouvernement voulait obtenir de Mittal la cession de l’intégralité du site, dont la stratégique “phase à froid” afin d’appâter un éventuel repreneur.

L’accord présenté vendredi ne prévoit pas de redémarrage des hauts-fourneaux de Florange, les derniers de la région Lorraine, mais seulement leur maintien dans un état qui permette de lancer à terme le projet Ulcos, une technologie qui permet une production d’acier plus écologique grâce à un captage du CO2 rejeté.

Ce projet doit néanmoins recevoir l’aval de la Commission européenne et il n’y a donc pas de garantie à ce stade que Florange accueille ce projet industriel.

Jean-Marc Ayrault a précisé que l’Etat, qui avait déjà réservé 150 millions d’euros pour le projet, était prêt à investir davantage.

L’annonce de vendredi arrive au terme d’une semaine tumultueuse autour d’un sauvetage symbolique de l’engagement du gouvernement à sauver l’industrie française.

Matignon s’est chargée de la négociations mais “les grandes lignes ont été fixées à l’Elysée”, a-t-on précisé dans l’entourage du président de la République.

Même s’il anticipe une certaine déception des syndicats, l’exécutif français veut croire que l’engagement initial du gouvernement a été tenu.

EN ATTENDANT ULCOS

“Cela ne sera jamais assez mais par rapport à la promesse de campagne qui est de dire qu’il n’y aura pas de licenciement, on maintient l’emploi sur Florange, l’activité sidérurgique sur le froid, on se donne les moyens de développer le chaud et on le prouve parce qu’en plus on fait payer 180 millions, c’est quatre arguments lourds”, a-t-on ajouté à l’Elysée.

En Lorraine, les premières réactions étaient néanmoins partagées.

“On nous donne le projet Ulcos, ce qui permet de faire couler l’acier lorrain et de pérenniser le site pour quinze ou vingt ans”, a réagi Walter Broccoli, responsable Force ouvrière à Florange, syndicat minoritaire chez ArcelorMittal

Jean-Marc Vécrin, délégué CFDT et responsable du syndicat ArcelorMittal Atlantique et Lorraine, s’est dit “très mitigé”.

“Le point positif, c’est qu’il n’y a pas de plan social et que les hauts-fourneaux restent debout. Par contre, nous sommes très sceptiques sur les engagements qui doivent être pris par M. Mittal. Ses promesses, on les connaît”, a-t-il dit à Reuters.

“A partir de maintenant, c’est un autre combat qui s’engage, il faudra chaque jour vérifier que ces engagements sont tenus.”

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