Ernest Mpararo de LICOCO : ‘’Eric Monga et ses associés sont des travailleurs et non des fraudeurs ’’

Deux ans après l’échec d’une enquête sur les allégations de concussion, fraude et enrichissement illicite auprès des agents de la DGDA/Katanga en Octobre 2013 et les différente agitations médiatiques qui s’en étaient suivies ; une année depuis l’ouverture du procès en flagrance contre Boniface Lititiyo, Inspecteur à la DGDA/Katanga, et ses complices pour fraude douanière sur une plainte de l’Etat et la DGDA, le Président National de la Ligue Congolaise contre la Corruption et la Fraude (LICOCO) Ernest Mpararo, qui suit de près à Kinshasa et Lubumbashi la situation depuis des années, répond aux questions de notre rédaction lors d’un entretien ci-dessous avec Parfait Barack et Ben Nkaya

Ernest Mpararo, Président de la Ligue Congolaise contre la Corruption et la Fraude (LICOCO) lors de l’entretien (Photo : MNM)

Ernest Mpararo et Licoco, continuez-vous à suivre l’évolution de la fraude douanière à Kasumbalesa, etc. ?

Oui, la LICOCO (Ligue Congolaise contre la Corruption et la Fraude) continue a suivre des près la situation de la fraude douanière au Katanga et à Kasumbalesa en particulier avec son partenaire RND. Aujourd’hui, nous sommes contents que le Gouvernement cherche à assainir l’environnement à Kasumbalesa en installant des machines pour contrôler le flux des marchandises mais cela avance petit à petit. La fraude continue mais à des degrés différents car les fraudeurs ont changé de comportement. Ils utilisent maintenant une autre voie que l’on appelle BILANGA ou douane parallèle . C’est par là que se passe quotidiennement la fraude au vu et au su de tous.

D’ailleurs, le Ministre des Finances actuel y était et a vu de ses propres yeux comment certains opérateurs économiques du Katanga qui sont dans le commerce général fraudent.

Avez-vous jamais sur terrain à la frontière pour voir comment les choses se passent?

J’ai déjà été à Kasumbalesa à plusieurs fois. Nous y avons mené des enquêtes avec RND dont les résultats dont les témoignages des services de l’Etat impliqués dans la fraude ont été transmis au DG de la DGDA et au Ministre des Finances Kitebi.

Sur place, j’ai personnellement constaté que malgré les efforts du Gouvernement d’assainir l’environnement économique à Kasumbalesa, il y a encore des agents qui résistent aux réformes mises en place par le Gouvernement. Certaines autorités politiques au niveau central refusent aussi d’exécuter les ordres venant de Kinshasa, par exemple la limite de quatre services aux frontières. Lors de notre visite à Kasumbalesa, nous avions constaté qu’il y a encore des services de l’Etat qui ont des bureaux sur place en violant le décret du Premier Ministre. C’est notamment le cas par exemple du bureau du Ministère du Commerce Extérieur, du Ministère de Transport et Voies de communication. Ces services ont leurs bureaux à Kasumbalesa et exigent l’argent, qui ne va pas dans les caisses de l’Etat, des grands importateurs et exportateurs en violation du décret du Premier Ministre.

Le Rapport de la Commission d’enquête envoyée par le PGR en 2013 conclut en accusant Eric Monga et Trade Service comme étant à la base des fraudes ayant coûté à l’Etat 3 milliards de dollars et la presse kinoise en a fait large échos? Qu’en pense LICOCO?

Vous devez comprendre le contexte dans lequel cette mission avait été envoyée au Katanga. Le rapport provisoire de cette commission accusait plusieurs sociétés minières à tort et à travers en se basant sur des contentieux non conclus en procédure contradictoire comme le prévoit le Code Douanier. Il est contestable d’ailleurs.

Pour Trade Service, ils ont été accusés principalement par une bande des douaniers déclarants surnommés DODE de Lubumbashi et leurs complices identifiés de Kinshasa qui voulaient gagner illicitement des millions de dollars de Boss Mining et autres comme ils en avaient fait avec d’autres agences pour TFM et KCC. Et je sais qu’ils se sont justifiés comme l’exige la procédure contradictoire.

Bizarre qu’on accusait Trade Service d’avoir dédouané des marchandises des miniers qui étaient consignées ou Sous Douane dans ses entrepôts concédés par l’Etat parfois sur site à Kakanda, des erreurs de procédure et non la soustraction à ne pas payer les droits du Trésor, comme il en est pour beaucoup de sociétés minières au nom du Code Minier qui leur donne un régime préférentiel ; et celui qui accusait n’a jamais été identifié parce que la même personne, Zacharie Bababaswe, s’est présentée comme Aviseur (dénonciateur) et comme Intervenant (témoin) lors des discussions entretenant une confusion inqualifiable.

Je pense que ce dossier a pris du temps et les deux parties ont trouvées une solution discutée après plusieurs séances de travail à la Direction Générale de la DGDA à Kinshasa. Actuellement, le dossier a été clos et l’Etat a récupéré son du sans que la concussion et l’enrichissement illicite aient prévalu. Les accusations de 3 milliards étaient des rumeurs car il n’y avait aucune preuve pour soutenir cela. Aussi, faut-il comprendre qu’un contentieux est un litige qui n’aboutit pas nécessairement en faveur de celui qui l’initie.

Lettre du Ministre Délégué aux Finances Patrice Kitebi rappelant au DG de la DGDA le respect de la loi sur les recouvrements forcés (Photo : MNM)

Pensez-vous que ladite Commission avait fait son travail conformément à son Ordre de mission d’enquêter sur les allégations de fraude, concussion et enrichissement illicite des agents de la DGDA/Katanga?

Les informations que nous avions reçu de la part du Ministre de la Justice disait que la mission du Procureur Général de la République Flory Kabange s’était permise de sceller des sociétés alors que cela n’était pas dans son ordre de mission dont nous avons une copie. Cela violait effectivement la loi car l’autorité pour sceller une société est la régie financière après avoir épuisé toute la procédure en la matière ou le Tribunal par un jugement.

Or, à ma connaissance, ni les régies financières et moins encore le Tribunal n’avaient donné l’aval à la mission du PGR de sceller une entreprise. La lettre du Ministre de Justice et celle du Ministre des Finances le disent clairement.

Donc, il ne faut pas être corrompu ou favoriser un cousin ou ami pour remarquer que la mission du PGR conduite par ce haut magistrat là avait outrepassé sa mission. J’ai passé un mois en suivant le dossier en novembre-décembre 2013 à Lubumbashi en visitant régulièrement Kasumbalesa, etc. Nous avons eu des séances de travail avec plusieurs agences en douane dont Trade Service et avec des officiels de la DGDA dont des responsables que je connais depuis longtemps. Je sais ce dont je parle mieux qu’une Ong ou un journaliste à qui l’on raconte des histoires dans un bureau ou restaurant de Kinshasa.

Qui fraude la douane à grande échelle d’après vous : les entreprises minières, agences en douanes, douaniers déclarants et agents de l’Etat, la douane parallèle ou Bilanga?

Avec  l’expérience que j’ai en la matière, les plus grands fraudeurs au Katanga sont les opérateurs économiques provenant des pays des Moyens Orient dont les libanais, les indiens,  les Chinois, les pakistanais et certains Congolais. Des agents des douanes à Lubumbashi fraudaient beaucoup aussi par leurs agences en douane contrairement à la loi sur les agents de l’Etat. Il y a des preuves avec des nom cités par des clients qui ont été roulés dans la fraude par un inspecteur de la DGDA au Katanga.

Les entreprises minières qui ont investit beaucoup des milliards en République Démocratique du Congo et sont privilégiées par le régime préférentiel du Code Minier, comme je l’ai dit,  n’ont pas a priori intérêt à frauder pour ternir leur image et s’exposer à des pénalité faramineuses. Si elles fraudent c’est d’une autre manière sur le fisc avec les impôts minorés. Les entreprises minières fraudent par le fait de gonfler leurs investissements empêchant l’Etat de jouir des dividendes générées par l’exploitation des minerais congolais.

Depuis un an, l’Inspecteur Boni  Lititiyo est en prison pour des raisons tribales ou règlements de comptes. Qu’en savez-vous?

Les informations en ma possession disent que monsieur Boni Lititiyo a été arrêté par les services de l’Etat pour des mauvaises pratiques, la fraude sur un camion à immatriculation de l’Afrique du Sud en octobre 2013. Ce n’est pas son premier forfait selon une pièce à conviction en ma possession. Ce n’est pas un problème tribal ou un règlement des comptes comme son entourage le prétend et comme lui-même le raconte dans un mémo envoyé au Ministre de Justice dans lequel il accuse encore Eric Monga et Trade Service…

(Lire l’intégralité de cet entretien dans Mining News Magazine d’Octobre 2015 en vente en à Lubumbashi et Kinshasa en République Démocratique du Congo ou commander la version électronique à miningnewsdrc@gmail.com)

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