La Gécamines, dépositaire du cuivre et cobalt en RD-Congo et unique entreprise publique de l’Etat aujourd’hui objet de toutes les convoitises, a engagé depuis 2016 notamment, des réformes importantes, avec l’appui de cabinets internationaux reconnus, pour d’une part transformer son organisation et offrir au pays l’entreprise minière qu’il mérite et d’autre part, engager un dialogue constructif avec ses partenaires pour rééquilibrer les Joint-Ventures et faire en sorte qu’enfin, les records de production annuels constatés dans le pays, profitent enfin aux Congolais et non aux multinationales comme il en est depuis plus de dix ans.
Cependant, des observateurs avisés, tel que le Professeur Steefan Marysse, note à ce sujet: ”Ce qu’on voit maintenant, selon les estimations du FMI, c’est qu’à partir de 2013, les rapatriements des profits sont plus grands que les nouveaux investissements qui entrent au pays et cette tendance s’amplifiera jusqu’en 2019. Et le pays perd. Si l’on prend la valeur actuelle de ces flux d’argent, il y a une perte nette de 17 milliards de dollars. Quand on le compare même avec les estimations les plus grandes d’argent que l’on a perdu dans la vente d’actifs, cette hémorragie légale des profits rapatriés pour le pays est beaucoup plus importante’’.
La reconduction de monsieur Yuma Mulimbi Albert à la tête du Conseil d’Administration et la nomination de Guy-Robert Lukama, Directeur en charge des Réformes de cette entreprise publique de l’Etat, au rand d’administrateur ainsi que la mutation du Directeur Général adjoint Jacques Kamenga pour occuper le même poste à la SNCC (Société nationale des chemines de fer du Congo) démontrent que le Chef de l’Etat Félix-Antoine Tshisekedi l’a compris et soutient totalement ce qui est fait et planifié afin que l’Etat actionnaire unique recouvre ses droits sur l’exploitation de ses gisements.
Toute la communauté internationale ainsi que tous les lobbies financiers occidentaux sont très bien informés que le constat du déséquilibre structurel dans la répartition des richesses minières en République Démocratique du Congo, a également été fait par la Banque Mondiale, Institution jumelle au Fonds Monétaire internationale (FMI), en avril 2016 lors de la révision de notre Code minier de 2002 trois paragraphes parmi d’autres qui mentionnent clairement que :
”Le choix de recourir à des multinationales exerçant dans le secteur formel n’a pas produit les retombées escomptées par l’État. […] Cela tient aux limites du Code minier, à l’incapacité de l’administration de le faire appliquer et à recouvrer des recettes auprès des différents producteurs.
Alors que le potentiel de la rente des ressources naturelles en RDC est un des plus élevés au monde et en Afrique Subsaharienne, le pays affiche un des plus faibles niveaux de mobilisation des recettes.
Les investisseurs étrangers ont davantage profité du boom du secteur des ressources naturelles à partir de 2007 que le Gouvernement et les producteurs locaux.”
Il est alors établi que cette situation a privé la Gécamines et la RDC de précieuses ressources nécessaires au développement du pays et dont le manque à gagner est, malheureusement, encore une fois bien supérieur à tout ce qui a jamais été reproché à cette entreprise, sans rien minimiser. Le Rapport Gécamines en réponse à quelques Ongs sur ce sujet précise que ces études ont été réalisées par des d’associés ERNEST & YOUNG Paris et de MAZARS, des firmes occidentales très bien connues et, qui ont mis à jour la gestion opaque et irrégulière de presque tous les partenariats de la Gécamines.
”Gécamines est en train de se remettre en marche”
Cette société doit redevenir un producteur minier qui compte en Afrique et dans le monde dans le respect du droit des affaires OHADA.
Selon Albert Yuma, la libéralisation, sous contrainte de notre secteur minier en 2002 a contraint l’entreprise à céder dans le cadre de joint-ventures où elle est minoritaire, ses principaux titres miniers qui représentent 32 millions de tonnes de cuivre et 3 millions de tonnes de cobalt. Comme, ses prédécesseurs et lui-même, ols n’ont eu de cesse d’essayer de sauver cette entreprise du dépôt de bilan. Malgré toutes les difficultés financières, sociales et opérationnelles, ils ont réussi à faire.
Toutefois, se remettre en marche implique quatre choses pour Albert Yuma.
Premièrement, adapter la structure et les effectifs à l’environnement minier : concrètement, cela veut dire sortir du fonctionnement bureaucratique et centralisé et confier la décision aux opérateurs de terrain ; réduire drastiquement les effectifs et ne conserver dans les opérations que ceux qui sont nécessaires.
Deuxièmement, relancer la prospection pour valoriser le patrimoine minier. La Gécamines ne disposait en 2018 de moins de 500.000 tonnes de cuivre certifiées, le reste ayant été cédé aux partenariats. En 2019, tous les efforts sont concentrés sur la certification de des réserves, qui sont le principal actif. Dix millions de dollars américains y sont alloués.
Troisièmement, développer des projets en propre pour être un opérateur minier à part entière, comme à Kingamyambo.
Et enfin, réexaminer tous les partenariats, comme fait avec KCC pour qu’enfin, la société touche les dividendes de l’exploitation par des multinationales des réserves du pays ; nouer des partenariats innovants, comme le partage de production qui assurera un retour garanti sur l’exploitation des gisements, contrairement aux dividendes.
Sur le plan des réformes légales, la Gécamines soutient le Code minier revu parce que selon le FMI notamment, le Code de 2002 a permis de nouer des partenariats avec des compagnies transnationales, dont l’Union africaine dans sa vision minière 2050, précise qu’ils ont été caractérisés par ”une faible conditionnalité, une faible répartition par l’Etat des rentes issues des ressources et une corrélation faible du secteur des ressources avec les économies nationales”.
Pour Albert Yuma, il faut en Afrique des codes qui réintroduisent des conditionnalités importantes en matière de locale content, permettent aux Etats de profiter de la rente générée par l’exploitation des leurs sous-sols et, surtout, de plugger l’activité minière aux activités nationales pour que cette industrie joue un rôle d’entraînement dans les économies dans lesquelles elle est implantée, et pas à l’extérieur, à travers les centrales d’achat mondialisé, dont ces grands groupes sont tous pourvus. La mise en œuvre de lois sur la sous-traitance est essentielle dans ce domaine, comme en RDC.
C’est pour contribuer à matérialiser cette vision et continuer avec les réformes initiées à la Gécamines que le Directeur Général Sama Lukonde Kyenge et le Directeur des Réformes Guy-Robert Lukama renforcent désormais le Conseil d’Administration que préside Albert Yuma en monsieur ‘’Fix-It’’ ou envoyé spécial chargé d’une mission bien précise confiée par le garant de la nation : relancer la Gécamines, la rendre productrice et compétitive, y promouvoir la bonne gouvernance en corrigeant les erreurs et déséquilibres des partenariats, investissant dans les recherches géologiques et la certification des réserves, obliger la mise en application de la loi sur la sous-traitance dans les partenariats, etc.
Par Franck Fwamba et Precious K.