Les compagnies minières chinoises qui opèrent en République démocratique du Congo (RDC) doivent faire davantage pour empêcher que leurs activités ne donnent lieu à des atteintes aux droits humains, déclare Amnesty International dans un nouveau rapport intitulé Pertes et profits. Exploitation minière et droits humains dans le Katanga, en République démocratique du Congo, qui étudie les conséquences de l’industrie minière dans le sud-est de la RDC.
Ce document rassemble des informations sur un certain nombre d’atteintes graves aux droits humains dans lesquelles sont impliquées des entreprises locales et étrangères, notamment des expulsions forcées – prohibées par le droit international – et l’imposition de conditions de travail dangereuses et constituant des formes d’exploitation.
Il accorde une attention particulière au rôle des compagnies chinoises, qui sont en passe de devenir les acteurs économiques étrangers les plus puissants et les plus influents du secteur de l’extraction minière en RDC, pays qui possède une partie des réserves minières les plus importantes au monde.
La Chine importe en outre de gros volumes de cobalt et de cuivre de la RDC, dont une grande partie est toujours extraite par des petits exploitants artisanaux – également appelés creuseurs – qui travaillent avec des outils manuels et dans des conditions souvent extrêmement difficiles.
«Depuis plusieurs dizaines d’années, l’exploitation minière en RDC donne lieu à des atteintes aux droits fondamentaux des mineurs artisanaux et des communautés voisines des mines, a déclaré Audrey Gaughran, directrice du programme Thématiques mondiales d’Amnesty International. Les autorités congolaises n’ont rien fait pour empêcher les compagnies minières et les marchands de bafouer les droits fondamentaux de la personne, et elles ont elles-mêmes commis des violations de ces droits afin de faciliter les opérations d’extraction.»
Les entreprises nient leur responsabilité
Interrogées par Amnesty International, plusieurs compagnies citées dans le rapport ont tenté de nier toute responsabilité dans ces atteintes aux droits humains en insistant sur le rôle des autorités dans les violations commises.
«Le fait que les autorités congolaises n’ont pas protégé les droits humains ne décharge pas les compagnies de leurs propres responsabilités pour leurs actions et omissions. Il est troublant que certaines compagnies aient évoqué l’implication de la police pour se justifier d’avoir elles-mêmes contribué à des violations des droits humains», a commenté Audrey Gaughran.
Expulsions forcées, morts et blessés
Le rapport cite notamment un cas où 300 familles ont été expulsées de force de leurs logements à Luisha, lorsqu’une compagnie chinoise, la Congo International Mining Corporation (CIMCO), a obtenu les droits d’exploitation du site au centre de la ville.
Un fonctionnaire local a donné aux familles un préavis de deux semaines, après quoi elles ont été emmenées jusqu’à un autre terrain dans des camions appartenant, d’après des personnes du groupe, à la CIMCO. Ces personnes ont simplement été abandonnées là, sans habitation ni aucune infrastructure.
La plus grande partie des activités d’extraction minière en RDC est toujours réalisée par des mineurs artisanaux qui travaillent dans des conditions dangereuses et sont victimes d’exploitation. Les atteintes aux droits fondamentaux des creuseurs sont très répandues dans le Katanga. Tous les ans, un grand nombre d’entre eux meurent ou sont grièvement blessés. Souvent, ils travaillent à main nue, sans tenues de protection et dans des puits mal ventilés, où les températures peuvent être extrêmement élevées.
Sur le site de Tilwezembe, à 30 km de la ville de Kolwezi, Amnesty International a pu constater des conditions de travail dangereuses, ainsi que des cas de mauvais traitements. Des accidents ont souvent fait des blessés, et parfois des morts, du fait de glissements de terrain, d’éboulements de rochers ou d’asphyxies dues à l’absence de ventilation adéquate.
Les creuseurs de Tilwezembe vendent leur minerai à Misa Mining, une compagnie marchande privée opérant sur le site. Des institutions de l’État, notamment la police, également présentes sur les lieux pour surveiller les activités, n’ont rien fait pour remédier aux conditions de travail épouvantables et dangereuses des creuseurs.
«Une plus grande transparence dans la chaîne d’approvisionnement pourrait contribuer à empêcher que soient commises des atteintes aux droits humains telles que celles constatées à Tilwezembe», a conclu Audrey Gaughran.
Des entreprises suisses également impliquées
Les entreprises chinoises ne sont pas les seules à tirer profit de l’exploitation de minerais dans des conditions désastreuses à Tilwezembe. De grandes sociétiés occidentales y investissent également, c’est le cas du géant Glencore-Xstrata, basé dans le canton de Zoug, cas illustratif de la campagne Droit sans frontières.
Source : Amnesty International